Le coin de la dithyrambe assumée.
Ma conviction est profonde aujourd’hui que ton image, Marco Pantani, m’accompagnera longtemps dans ma vie ; moi la vie j’ai encore la chance d’y être. Toi tu l’as quittée. D’écrire ce que je viens d’écrire, comprends-tu que c’est pour moi comme une aberration ? Est aberrant ce qui s’écarte du type normal, et de l’ordre attendu des choses. L’idée de ta mort (mais que ces mots me sont pénibles…) m’est absurde, insensée : au sens propre, dépourvue de sens. C’est pourquoi cette lettre que je t’adresse, c’est à la fois un mot d’amour et une fusée de détresse envoyée à l’Ordre des Choses.
Les choses de la vie ce matin sont à l’image de ma vision soudaine du monde, misérablement tristes et amorphes. Les couleurs de l’arc-en-ciel sont tombées et le gris chagrin a envahi la vie. La représentation que je m’en fais n’a plus grand-chose de dynamique. L’un de mes fantasmes vitaux, du moins ce qui en était l’âme et le socle, s’est purement évanoui à mon insu dans la vacuité du cosmos. On ne peut supporter sans faiblir la disparition de ce qui nous donna matière à rêver. Je ne suis pas du genre à vouer un culte à un homme, mais je sais m’attacher considérablement à la part de la magie qu’il a su apporter à la mythologie. Nous y avons tous une part, minime ou grandiose, qu’un autre peut apprécier à la mesure qu’il veut, et qu’il peut décider de rattacher à la mythologie. Quant à moi, ce que je trouve dans les hommes de contribution mythologique, c’est une transcendance d’une sorte unique. L’exemple par dessus tout de la grâce des anges est celui de Charly Gaul.